
L'écrivain algérien, Yasmina Khadra, est depuis longtemps passé maître dans l’analyse généreuse de la nature humaine, la compréhension des comportements induits par la naissance et les circonstances de la vie qui réduisent sans doute le champ du libre-arbitre. Et de défendre toujours le refuge et le salut qu’offrent ou permettent la vertu et l’amour de l’autre. Dans le même sens, il refuse le jugement manichéen et l’assimilation des hommes vertueux à un seul camp quand ils peuplent tous les pays, toutes les sociétés, toutes les générations et tous les mondes.
"Les vertueux", son nouveau roman illustre une fois de plus un message de réconciliation, d’autant plus remarquable qu’il émane d’un fils de combattant de l’Armée de Libération Nationale ayant lui-même servi vingt-cinq ans dans l’armée algérienne avant de prendre la plume au service d’un combat généreux et humaniste.
L'histoire du roman, l'histoire de Yacine
Yacine Chéraga a l’âge de la conscription à l’automne 1914 et va prendre sous la contrainte la place d’un autre pour aller combattre sur le sol de France. Étant seul dans son douar perdu d’Algérie à savoir lire et écrire, Gaïd Brahim, le caïd qui asservit et terrifie tout son fief, le désigne pour prendre la place de son fils qu’il veut épargner. En contrepartie de cet engagement et de son silence absolu sur ce marché de dupes, sa famille profitera de la protection du caïd le temps de la guerre et lui, Yacine, à son retour, recevra une maison et des terres épargnant de la misère tous les siens pour toujours.
Yacine, enrôlé sous un nom d’emprunt, va ainsi s’arracher à leur affection et à sa terre natale sans explication, rejoindre un cantonnement sommaire pour apprendre à la hâte le maniement des armes, découvrir ses compagnons d’infortune, traverser la Méditerranée puis la France et combattre dans la Marne sous l’étendard du 2ème Régiment de Tirailleurs d’Afrique.
S’en suivront quatre années de guerre, de combats héroïques et vains, de tranchées et de typhus, de blessures et de mort rendant Yacine Cheraga alias Brahim à la vie civile fracassé, hanté par la mort de ses frères d’armes, le danger et la peur, fracassé mais libre ; une simple sardine, le galon du caporal, fleurira son épaule en dépit de ses faits d’armes.
Le caïd ne tiendra pas sa promesse, organisera le retour du héros en la personne de son fils et tentera de se débarrasser de Yacine, seul témoin de l’imposture, lui imposant une vie d’errance et de dissimulation qu’il traversera toujours avec sagesse, résignation et confiance.
Ainsi, et dans la quête insatiable de sa famille disparue qui va suivre, Yacine alias Brahim va-t-il connaitre l’aisance et la misère, l’amour et la haine, la prison et la liberté et vivre ces alternances dans la fidélité à l’enseignement reçu qui veut que l’homme ne décide rien de son sort et le subisse sans faiblir, avec pour seule mission la vertu, condition de son salut.
Qui est Yasmina Khadra ?
Pourquoi Yasmina Khadra s’appelle Yasmina Khadra ? Mohammed Moulessehoul voulait échapper à la censure en Algérie et choisit les deux prénoms de sa femme comme pseudonyme. Officier de l’armée algérienne pendant 25 ans, il fait valoir ses droits à la retraite en 2000 pour se consacrer entièrement à l'écriture. Les lecteurs le découvrent avec la série du Commissaire Llob. Il est l’auteur de la trilogie Les Hirondelles de Kaboul, L’Attentat et Les Sirènes de Bagdad, ou encore Ce que le jour doit à la nuit. Traduits dans une cinquantaine de pays, plusieurs de ses livres ont été portés à l’écran