
Jeudi 17 et vendredi 18 février à 18h00, sortira sur grand écran en avant-première mondiale le film «Siciliens d’Afrique. Tunisie Terre promise», réalisé par Marcello Bivona et produit par Alfonso Campisi, présenté par l’Institut culturel italien au cinéma Mad’Art de Carthage.
Le documentaire retrace l’histoire de l’émigration sicilienne en Tunisie entre le XIXe et le XXe siècles, avant, pendant et après le Protectorat français. La communauté sicilienne était la première communauté non musulmane de Tunisie et la composante numériquement la plus importante au sein de la collectivité italienne de Tunisie.
Le film s’inscrit dans un travail sur la mémoire des Siciliens de Tunisie, commencé il y a une vingtaine d’années et qui a vu la publication de plusieurs ouvrages en Tunisie, en Italie et en France, ainsi que des journées d’études et colloques sur cette présence si nombreuse et si laborieuse, plus proche des Tunisiens que des Français, et ce, pour différentes raisons liées à la culture méditerranéenne, au statut social, etc.
Cette coproduction italo-tunisienne s’intéresse aussi et, pour la première fois, à la langue parlée par la communauté sicilienne de Tunisie, le «siculo-tounsi», cette variété linguistique du sicilien mélangé à l’arabe tunisien, au français et même au maltais, l’une des particularités qui distingue aujourd’hui cette communauté de 3.500 individus environ, toujours présente et parfaitement intégrée en Tunisie depuis des siècles.
Le réalisateur Marcello Bivona, Sicilien de Tunisie lui aussi, mais parti au lendemain de l’Indépendance du pays avec sa famille à l’âge de trois ans pour s’installer dans la banlieue de Milan, est resté toujours très attaché à son pays d’origine, comme d’ailleurs tous ceux et celles qui ont quitté la Tunisie en 1956.
Quatre-vingt-dix pour cent de la collectivité italienne étaient siciliens, tout comme la grande actrice Claudia Cardinale, l’une des voix de ce film avec sa fille Claudia Cardinale Squittieri qui, pour la première fois, apparaît dans un film à côté de sa mère.
Le documentaire s’intéresse aussi au partage des traditions et de la vie quotidienne entre les différentes communautés, dans une Tunisie multiethnique, mais aussi le drame vécu par la communauté sicilienne au moment où la Tunisie devient indépendante. Cette masse de travailleurs se verra ainsi «obligée» de quitter le pays, là où leurs ancêtres étaient nés, sans vraiment comprendre les raisons, d’autant plus que les Siciliens étaient très proches des Tunisiens, tout comme les Maltais, les Espagnols ou encore les Grecs.
Marcello Bivona a mis aussi l’accent sur les responsabilités du gouvernement italien de l’époque, qu’une fois après avoir encouragé le départ des Italiens de Tunisie à l’Indépendance, n’a pas su comment organiser ce flux migratoire à destination de l’Italie, pays que la plupart des Siciliens de Tunisie, méconnaissait. En effet, ces Italiens de «seconde zone» ont été placés dans des «camps de réfugiés» s’intégrant très difficilement à la population locale.
Pour conclure, Marcello Bivona a réussi à rendre ce film, un témoignage très émouvant et à élucider certains aspects de cette page de l’émigration italienne en Tunisie, encore négligés. Une histoire commune à la Tunisie, à l’Italie et à la France, qui mérite d’être connue.
Des remerciements vont à l’Institut culturel italien, l’Université de Catane, M. et Mme Bannino, à la société Norama de Marysa Impellizzeri, à la société D’Artagnan et aux membres de la communauté sicilienne de Tunisie, d’Italie et de France, qui ont permis la réalisation de ce film documentaire.
Marcello Bivona
Le réalisateur, Marcello Bivona, un Sicilien de Tunisie, a quitté son pays à l’âge de 3 ans, en 1956, lorsque la France a mis fin à son protectorat. Il s’est installé en Italie, à Milan, avec sa famille, mais demeure très attaché à son pays d’origine.
«Je voulais que ce film témoigne des différentes facettes de l’immigration italienne en Tunisie, notamment celles qui sont trop souvent négligées», explique Bivona. «J’ai tenté de raconter une histoire commune à la Tunisie, à l’Italie et à la France. Une histoire qui mérite d’être connue.»
Dans les années 1950, 90% de la communauté italienne de Tunisie étaient des Siciliens, comme l’actrice italienne Claudia Cardinale, née en Tunisie en 1938.
Cette dernière devient la vedette de plusieurs films européens illustres dans les années 1960 et 1970. Elle a tourné en italien, en français et en anglais, y compris dans The Pink Panther («La Panthère rose», NDLR). Sa fille, Claudia Squitieri, est à l’affiche de Siciliens d’Afrique. Tunisie Terre promise.