
Maglor - Cinq Premiers ministres en trois ans : la Ve République, longtemps symbole de stabilité, traverse une crise politique sans précédent. La dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024, suivie d’élections législatives anticipées, a ouvert une ère d’instabilité que la démission, mardi, de François Bayrou vient encore accentuer.
Le président de la République, Emmanuel Macron, a accepté la démission de son allié historique du MoDem, qui assure désormais les affaires courantes jusqu’à la nomination d’un nouveau gouvernement. L’Élysée a annoncé qu’un successeur serait désigné « dans les tout prochains jours ». Parmi les noms évoqués figurent Éric Lombard, Sébastien Lecornu ou encore Catherine Vautrin.
Une France fragmentée politiquement
Quel que soit le choix du chef de l’État, il s’agira du cinquième chef du gouvernement depuis le début du quinquennat en 2022. Un record qui illustre les fractures profondes d’un paysage politique éclaté.
À l’Assemblée nationale, les lignes de fracture sont nettes. Le Rassemblement national réclame une dissolution « ultrarapide » et de nouvelles élections, tandis que La France insoumise va plus loin en appelant directement au départ du président Macron. Jean-Luc Mélenchon estime que seule une élection présidentielle pourrait « refonder » les institutions.
Les écologistes et les socialistes, quant à eux, se positionnent dans une logique de dialogue. Marine Tondelier a appelé le président à « recevoir » les représentants de la NFP avant toute décision, tandis qu’Olivier Faure plaide pour une « cohabitation » avec la gauche.
En toile de fond : l’Algérie attentive
Cette instabilité française est suivie de près en Algérie, où la situation politique de l’Hexagone est considérée comme un facteur pouvant influer directement sur les relations bilatérales. Depuis plusieurs mois, Alger et Paris traversent une période de tensions alimentées par les déclarations et la ligne dure de Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur.
Pour de nombreux observateurs, une nomination à Matignon issue de la gauche ou d’une coalition élargie pourrait signifier la fin de l’ère Retailleau. Un changement jugé déterminant pour amorcer un possible dégel diplomatique.
Rachid Temal, sénateur socialiste et président du groupe d’amitié France-Algérie au Sénat, l’a confirmé récemment : « Le départ de Bruno Retailleau faciliterait la reprise des contacts entre Alger et Paris ».
De son côté, le président algérien Abdelmadjid Tebboune avait clairement exprimé ses réserves en février dernier dans les colonnes de L’Opinion : « Tout ce qui est Retailleau est douteux compte tenu de ses déclarations hostiles et incendiaires envers notre pays ».
Vers un nouveau chapitre ?
L’hypothèse d’un gouvernement marqué par une ouverture à gauche pourrait ainsi redéfinir la relation franco-algérienne. Alors que la France traverse une crise institutionnelle et sociale profonde, ce rééquilibrage politique pourrait devenir, paradoxalement, une opportunité de relancer un dialogue interrompu.
La nomination du futur Premier ministre sera donc scrutée non seulement à Paris, mais aussi de l’autre côté de la Méditerranée.