
L’Algérie a décidé mercredi de «revoir» ses relations avec le Maroc, accusé d’être impliqué dans les incendies meurtriers qui ont ravagé le nord du pays, une nouvelle escalade dans la crise diplomatique qui oppose les deux pays.
(AFP) - «Les actes hostiles incessants perpétrés par le Maroc contre l’Algérie, ont nécessité la révision des relations entre les deux pays et l’intensification des contrôles sécuritaires aux frontières Ouest», a indiqué mercredi un communiqué de la présidence algérienne, sans autre précision. La frontière entre l’Algérie et le Maroc est officiellement fermée depuis le 16 août 1994. Rabat n’avait pas réagi en fin de soirée.
Cette décision a été prise lors d’une réunion extraordinaire du Haut conseil de sécurité algérien, présidée par le chef de l’État Abdelmadjid Tebboune et consacrée à l’évaluation de la situation après les gigantesques feux de forêt qui ont fait au moins 90 morts dans le nord du pays. Selon le président Tebboune, la plupart de ces incendies étaient d’origine «criminelle» -- sans que ne soit présentée jusqu’à présent la moindre preuve.
L’enquête a permis de «découvrir qu’un réseau criminel, classé comme organisation terroriste», est derrière les incendies, «de l’aveu de ses membres arrêtés», selon la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN).
Lynchage
Au-delà des pertes humaines et matérielles, et des carences des pouvoirs publics mises en lumière lors de ces incendies, les Algériens ont été profondément choqués par le lynchage et l’immolation d’un homme accusé à tort de pyromanie en Kabylie, région berbérophone du nord-est du pays ravagée par les feux. Soixante-et-un suspects ont été arrêtés depuis le meurtre de Djamel Ben Ismaïl le 11 août.
Les dirigeants algériens ont accusé le MAK (Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie), une organisation indépendantiste, d’être responsable des incendies et de la mort ignominieuse du jeune homme. Certains des suspects arrêtés ont confessé appartenir au MAK, selon des aveux filmés et diffusés par les télévisions algériennes.
«Le Haut conseil de sécurité a décidé (…) d’intensifier les efforts des services de sécurité pour l’arrestation du reste des individus impliqués dans les deux crimes, ainsi que tous les membres des deux mouvements terroristes qui menacent la sécurité publique et l’unité nationale, jusqu’à leur éradication totale, notamment le +MAK+ qui reçoit le soutien et l’aide de parties étrangères, en tête desquelles le Maroc et l’entité sioniste (ndlr: Israël)», selon la présidence algérienne. Basé à Paris, le MAK, interrogé par l’AFP, a rejeté ces allégations.
Le président Tebboune a affirmé que la plupart des incendies étaient d’origine «criminelle». Les dirigeants algériens ont accusé une organisation indépendantiste kabyle basée à Paris d’être impliquée dans ces incendies et dans le lynchage d’un homme accusé à tort de pyromanie en Kabylie (nord-est), la région la plus touchée par les feux. Ils ont également mis en cause le mouvement islamo-conservateur Rachad établi à Londres. Ces deux mouvements, bêtes noires du pouvoir algérien, sont illégaux en Algérie où ils ont été classés comme «organisations terroristes» le 18 mai dernier.
Le Mouvement pour l'Autonomie de la Kabylie (MAK) est accusé de recevoir « soutien et aide de parties étrangères, notamment du Maroc et de l’entité sioniste ». C’est à partir de ces accusations, qu’il a été décidé de revoir les relations avec ce pays et de renforcer la surveillance aux frontières ouest. « Les actes hostiles répétés du Maroc à l’égard de l’Algérie ont amené à reconsidérer les relations entre les deux pays et à intensifier la surveillance sécuritaire sur les frontières ouest », a ajouté le communiqué de la présidence algérienne.
Cet épisode consacre une nouvelle dégradation des relations conflictuelles entre Alger et Rabat. Il y a un mois, Alger rappelait son ambassadeur à Rabat pour « consultations avec effet immédiat » à la suite de tensions diplomatiques. La normalisation des relations diplomatiques entre le Maroc et Israël – en contrepartie d’une reconnaissance américaine de la « souveraineté » marocaine sur ce territoire – a encore avivé les tensions avec l’Algérie, qui a dénoncé des « manœuvres étrangères » visant à la déstabiliser.