
Le peintre milanais Giuseppe Arcimboldo (1526-1593) déploya ses multiples talents au sein de la plus puissante cour d'Europe, celle des Habsbourg. Il y acquit la notoriété grâce à ses têtes composées, mais aussi comme conseiller artistique et metteur en scène des fêtes impériales. Ses oeuvres sont exposées au Centre Pompidou de Metz jusqu'au 22 novembre 2021.
Si les portraits composites d’Arcimboldo sont aujourd’hui universellement connus, la richesse et la diversité de son œuvre restent à découvrir. Giuseppe Arcimboldo (1526-1593) est un inventeur et un penseur dont les réflexions et les travaux dépassent la question de la représentation du visage dans la peinture. L’exposition montre combien son œuvre irrigue l’histoire de l’art depuis cinq siècles et vient éclairer nombre de débats philosophiques et politiques actuels.
Outre le caractère exceptionnel de la présentation des célèbres Saisons du musée du Louvre et de la Real Academia de Bellas Artes de San Fernando à Madrid, l’accent est mis sur ses œuvres les plus surprenantes : les vitraux qu’il a créés au tout début de sa carrière à la Cathédrale de Milan, les dessins à la plume et au lavis bleu de la Galerie des Offices pour les fêtes et les tournois de la cour des Habsbourg, ainsi que Le Bibliothécaire, qui frappe le regard par son langage profondément conceptuel.
Dès l’entrée de la Grande Nef du Centre Pompidou-Metz, le visiteur se confronte à l’expérience de l’installation de Mario Merz, recomposée avec ses trois parties pour la première fois depuis 1987 – l’Hommage à Arcimboldo, Cono et la Table de Chagny – où se succéderont, au rythme des jours, fruits et légumes. Head VI (1949) de Francis Bacon avoisine les collages d’Hannah Höch, Anders (Brighton Arcimboldo) (2005) de Wolfgang Tillmans jouxte l’Étude dans les catacombes de Palerme (1924) d’Otto Dix, Untitled (#155) (1985) de Cindy Sherman dialogue avec La Poupée (1935-1936) d’Hans Bellmer. Ailleurs, les fresques de Pompéi viennent illuminer les masques de la boutique dans laquelle James Ensor a passé sa vie.
Avec ses amples ouvertures, le parcours architectonique permet de croiser les nouvelles créations de Fernando et Humberto Campana, la monumentale fontaine phosphorescente Hills and Clouds (2014) de Lynda Benglis, l’impressionnant Gardien du jardin (XVIIe siècle), unique sculpture arcimboldesque existante, ou encore le cabinet secret de Prague du légendaire cinéaste surréaliste contemporain Jan Švankmajer. Plus loin, le portrait d’Antonietta Gonzalez (1594-1595) par Lavinia Fontana, du château royal de Blois, la vidéo de Pierre Huyghe, Untitled (Human mask) (2014) et les portraits de Zoe Leonard autour de la femme à barbe du Musée Orfila (1991) se côtoient.
Dans le Forum du Centre Pompidou-Metz, l’installation Le désir attrapé par le masque, créée spécialement pour l’exposition par Annette Messager, se déploie sous la forme d’une farandole d’animaux masqués qui manifeste le bizarre et l’inconnu, l’affreux et le séduisant, et ouvre une réflexion sur l’hybridation.
Dans sa déambulation au rythme de confrontations inattendues, le visiteur est invité à faire l’expérience, de manière intuitive, des paradoxes entre l’être humain et l’animal, le végétal et le minéral, le naturel et l’artificiel, la brutalité et le raffinement, l’invention et la nostalgie, l’enracinement et le désir de départ. Des extrêmes qui apparaissent aujourd’hui plus que jamais nécessaires, comme l’est l’esprit d’Arcimboldo, pour pouvoir naviguer dans l’univers complexe de la création artistique.